Église Saint-Clément

Localisation :

Tours, place des Halles

Dates :

1462-1470

État du batiment :

Détruit

Église Saint-Clément avant destruction en 1883, André Arsicaud, 1950, reproduction photographique, Tours, Archives départementales d’Indre-et-Loire, collections de Touraine, 5Fi111317.
Crédits : Archives départementales d’Indre-et-Loire.

Les premières mentions de l’église Saint-Clément remontent au IXe siècle. Elle se retrouve alors sous la dénomination de celle sancto Clementis dans un diplôme de 854. Cette cella était un espace dédié aux soins des pauvres [Palustre, 1887, p. 1]. Jusqu’au XIe siècle, l’établissement Saint-Clément était l’un des hospices les plus importants de la cité. À partir de 1184, quand la paroisse Saint-Clément fut créée, la chapelle de l’hospice fut délaissée par l’aumônier de Saint-Martin pour en faire l’église paroissiale [Palustre, 1887, p. 31]. 

 

Quartier Saint-Clément au XVe siècle, plan extrait de Léon Palustre, « Monographie de l’église Saint-Clément de Tours », dans Mémoire de la Société archéologique de Touraine, T. II, 1887, p.87.
Crédits : Source gallica.bnf.fr / BnF

 

L’église fut entièrement reconstruite entre 1462 et 1470. Le financement des travaux fut facilité par une bulle d’Innocent VIII qui offrit des indulgences à ceux qui feraient des dons pour la nouvelle église. C’est ainsi que Jean Briçonnet patronna les travaux en tant que maire de la ville en 1462, d’où l’inscription de son nom dans le Chœur. La construction de la nouvelle église fut confiée à l’architecte Jean Gaudin qui dut composer avec les difficultés spatiales des lieux. L’église était en effet enclavée dans un espace assez restreint, coincée entre l’enceinte de la cité et la nécessité de laisser l’accès libre au cimetière contigu au sud [Palustre, 1887, p. 87-88]. L’ouvrage ne pouvait donc dépasser 30m de long. Jean Gaudin opta finalement pour un édifice orienté de plan rectangulaire de 26m de long, sur presque 17m de large. La Nef était divisée en trois vaisseaux par deux files de piles octogonales [Palustre, 1887, p. 89]. Le pignon de la façade occidentale était coiffé d’un clocher,  dont l’existence est attestée par un procès verbal de l’aliénation de l’église à la Révolution française. Il avait déjà disparu sur les photographies avant la destruction en 1883 [Biens nationaux, liasse I, district de Tours, n° 32, art. 11]. 

 

Vue de Saint-Clément en 1755, dessin extrait de Palustre Léon, « Monographie de l’église Saint-Clément de Tours », dans Mémoire de la Société archéologique de Touraine, T. II, 1887, p. 96.
Crédits : Source gallica.bnf.fr / BnF

 

Sur les 26 m de longueur, cinq travées présentaient une largeur inégale. Elles étaient espacées de manière à donner plus d’étendue aux deux travées du chœur [Palustre, 1887, p. 90]. Ces dispositions impliquaient une ordonnance de façade asymétrique. Les remplages des baies présentaient un dessin flamboyant à soufflets et mouchettes.

 

Plan général de l’église Saint-Clément, extrait de Palustre Léon, « Monographie de l’église Saint-Clément de Tours », dans Mémoire de la Société archéologique de Touraine, T. II, 1887, p. 96, pl. 2.
Crédits : Source gallica.bnf.fr / BnF

 

Pour épauler les murs, à l’usage des arcs-boutants, on préféra des contreforts placés sur le mur gouttereau du Vaisseau central et des collatéraux liés par d’épais arcs doubleaux affleurant dans la toiture. L [Palustre, 1887, p. 98].  À l’est, la topographie du lieu contraignait à faire le choix d’un Chevet plat et non d’une abside. Comme témoins de l’ancienneté de la fondation, on conserva dans les nouvelles maçonneries des portions de murs de l’édifice du XIIe siècle. Ainsi un pan de mur et sa porte murée demeurèrent au sud (« O » Plan général )  [Palustre, 1887, p. 99-101]. 

 

Portail de l’église Saint-Clément à Tours, estampe d’après un dessin de Thérond, 21,10 x 15,10 cm, Tours, Archives départementales d’Indre-et-Loire, collections de Touraine, 8Fi0319.
Crédits : © Archives départementales d’Indre-et-Loire, 8Fi0319.

 

L’entrée principale se faisait par un porche au nord ( « X » Plan général ) moins long mais plus richement orné que le porche à l’ouest. Cette préférence s’explique par un dégagement plus important du parcellaire au nord, alors que la façade ouest était enserrée entre l’enceinte et le cimetière. La richesse ornementale du porche septentrional s’exprimait par l’ouverture d’un large arc brisé redenté dont la partie supérieure était surmontée d’un gâble orné de soufflets et de mouchettes couvrant également les écoinçons. À l’intérieur, la voûte d’ogives à nervures multiples naissait du trumeau du portail d’entrée. Les vantaux en bois du portail septentrional étaient magnifiés par un décor sculpté (le Vantail gauche est actuellement conservé à l’hôtel Goüin). Les linteaux de porte couverts d’arcs segmentaires étaient surmontés d’un élégant gâble en Accolade donnant naissance à un réseau de remplages ajourées dont les feuillages portaient les armoiries de la famille Briçonnet [Palustre, 1887, p. 102-106 ; Bourassé, 1842, p. 144-145]. 

 

Ancienne église Saint-Clément disparue au XIXe siècle, Robert Malnoury, photographie, Région Centre-Val de Loire, Inventaire général du patrimoine, IVR24_76370399XB_2.
Crédits : © Région Centre-Val de Loire, Inventaire général, Robert Malnoury

 

La façade ouest possédait donc un porche plus large mais au décor plus discret. Entre deux épais contreforts surmontés de pinacles, s’ouvrait un large arc en anse de panier. Le pignon était orné d’une haute baie couverte d’un arc brisé, divisée par trois meneaux. Enfin, une petite rose à huit lobes éclairait les combles. À la rencontre du porche et de la façade occidentale, une tourelle d’escalier conduisait dans les combles. [Palustre, 1887, p. 93-97]. Les modifications postérieures du porche, notamment l’ajout d’un toit en appentis, coupèrent la baie et supprimèrent le remplage. En 1840, une tempête de vent mutila encore davantage la baie [Bourassé, 1842, p. 143]. 

 

Tribune de l’église Saint-Clément, Albert Dujardin, héliographie extraite de Léon Palustre, Monographie de l’église Saint-Clément de Tours, Tours, Péricat, 1887, 1 vol. in-4°, pl. XI.
Crédits : Source gallica.bnf.fr / BnF

 

Au revers de la façade occidentale, prenait place une tribune de style Renaissance. Une partie de la tribune est encore visible aujourd’hui puisqu’elle a été remontée au musée de la Société archéologique de Touraine. Les remplages, redents et gâbles gothiques de l’église laissent place aux rinceaux, aux volutes et aux palmettes décorant l’arc en anse de panier qui soutient la tribune. Les écoinçons contiennent, à l’exception de ceux aux armes de Jean Ragueneau, des écussons bûchés à la Révolution française. Sur le garde-corps, le motif répété du dauphin à queue feuillagée donne l’illusion d’un rinceau continu. Ce motif se rencontre également sur le Lanternon de la tour nord de la cathédrale de Tours réalisé par Bastien et Martin François en 1504-1507. La corrélation entre ces deux motifs, quasi similaire, permet d’avancer l’attribution de la tribune aux frères François ou un une influence de leurs œuvres  [Palustre, 1887, p. 119-122 ; Bourassé, 1842, p. 144 ; Hamon-Brun, 1996, p. 42]. 

 

Église Saint-Clément : clef de voûte sculptée, Robert Malnoury, photographie, Région Centre-Val de Loire, Inventaire général du patrimoine, IVR24_85370831X_2.
Crédits : © Région Centre-Val de Loire, Inventaire général, Robert Malnoury

 

La chambre du trésor se tenait dans la surélévation du côté sud. Cette petite salle, au mur épais avec une niche murale et peu d’ouvertures, répondait aux exigences pratiques et de sécurité pour abriter le trésor. Là pouvaient être déposés les chartes, les titres, les reliquaires et les pièces d’orfèvrerie [Palustre, 1887, p. 123-124]. La nef était couverte de voûtes sur Croisée d’ogives essentiellement quadripartites, sauf la première Travée du vaisseau central et la dernière du Collatéral sud qui présentaient une structure à nervures multiples. Les clefs étaient liées par des liernes décorés par des clefs sculptées particulièrement belles. Celle du chœur représentait Dieu le père et d’autres présentaient les armoiries de la famille Briçonnet, permettant de déterminer la date de travaux à Saint-Clément. En plus de l’analyse stylistique, les armoiries de Jean Ragneau, maire de Tours en 1513, précise la période de construction de la tribune [Palustre, 1887, p. 114-116]. 

 

La paroisse Saint-Clément fut supprimée en 1790. Il fut décidé que l’église Saint-Clément, dorénavant inutile, serait transformée en une halle au blé. La ville se porta acquéreur de l’église qui était devenue bien national lors d’une vente aux enchères, elle ne paya cependant jamais les 8225 livres auxquelles elle avait été adjugée. Finalement, 30 ans plus tard, il fut décidé d’abandonner les demandes de recouvrement faites à la municipalité [Palustre, 1887, p. 78]. L’église conserva son usage de halle jusqu’à sa destruction en 1883 qui permit d’agrandir la place [Palustre, 1887, p. 81-82]. 

 

Bibliographie

Base POP, IA00071207
Bourassé Jean-Jacques « Rapport de la commission chargée de visiter et d’étudier l’ancienne église de Saint-Clément », dans Mémoire de la Société archéologique de Touraine, T. I, 1842, p. 141-146.
Hamon-Brun Maud, L’activité artistique à Tours, 1495-1515, Mémoire de maîtrise : Histoire de l’Art, sous la direction de Jean Guillaume, Université de Tours, Tours, Centre d’Études Supérieures de la Renaissance, 1996. 
Palustre Léon, « Monographie de l’église Saint-Clément de Tours », dans Mémoire de la Société archéologique de Touraine, T. 2, 1887.


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